Neuvy Saint Sépulcre - Gargliesse - Camino

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NEUVY SAINT SEPULCRE - GARGLIESSE
Dimanche, 20 mai 2012
Jour 3
26 km
 
Il a plu toute la nuit et ça n’a pas l’air de s’arrêter dans l’immédiat. Plus que de la pluie, je m’inquiète du genou de Daniel. Le rouge vif de la soirée a disparu mais on peut néanmoins voir un gonflement.
« Je pense que cela devrait aller » me dit Daniel et, après coup, je ne peux que lui exprimer mon étonnement et mon admiration sachant aujourd’hui qu’en fin de journée nous aurons fait vingt-six kilomètres, sans compter la visite des alentours de notre lieu d’arrivée.
Les ânes se sont un peu embêtés dans la bétaillère mais l’alternative était le pré sans un abri contre la pluie et le vent. Dès notre départ, nous leur mettons la bâche anti-pluie et nous nous dirigeons en direction de la D38. Henry passe sans problème par l’ouverture d’une haie devant laquelle se trouve une petite flaque d’eau. Basile quant à lui préfère tester l’état du genou de Daniel et lui demande un détour de quelque cent mètres. Une fois les deux ânes réunis, nous croisons Xavier qui s’est également lancé de bonne heure. Il préfère suivre le chemin officiel alors que nous décidons de rester sur la D38, pour éviter des passages inutiles par des flaques d’eau plus grandes dans les chemins ruraux et contourner ainsi des problèmes potentiels de passage de nos ânes. La progression sur le goudron n’a dans le passé jamais posé de problèmes et cette décision nous semble plus raisonnable puisque le guide indique à la sortie de Neuvy « fin du goudron : continuer sur le chemin de terre herbu en face (difficile après de fortes pluies) ».
Les origines de Mouhers que nous passons sous une pluie très fine sont peu connues et remontent probablement au XIIe siècle, quand il est fait mention la première fois du village sous la dénomination de Moers. Compte tenu de la pluie et du fait que l’église Saint-Maurice ne semble avoir rien de particulier au vu de son extérieur, nous continuons notre route avec les propos « ils ont du courage «  d’une de ses habitantes. Contrairement à d’autres villages où à part l’exploitation agricole semble être la seule ressource, Mouhers a l’avantage d’une carrière où l’on exploite de l’amphibolite qui est utilisé dans la construction routière.
Daniel boîte légèrement mais n’a visiblement pas de douleurs trop aiguës qui l’empêcheraient de continuer la route.
Près de Cluis, le chemin officiel croise la D38 et nous retrouvons de nouveau Xavier. Dans une petite montée où un troupeau de moutons a cherché refuge contre la pluie sous un chêne assez impressionnant, le premier couple de Hollandais nous rattrape à vélo. Le monsieur à l’avant et à une distance non négligeable de son épouse. Vu la montée et la manière dont ils se sont protégés contre la pluie, ils doivent probablement être aussi trempés sous la pèlerine que cette dernière ne l’est de l’extérieur. Une petite photo de part et d’autre et chacun continue sa progression.
L’histoire de Cluis tel qu’on connaît le village aujourd’hui est assez mouvementée. Pour avoir été divisé par voie d’héritage aux alentours des années mille cent en un Cluis-Dessous et un Cluis-Dessus, le tout a de nouveau été réuni en mille sept cent soixante-sept.
Le dimanche est jour de marché à Cluis. Comme la pluie du matin n’arrête pas le pèlerin, elle le fait néanmoins pour les locaux. Henry passe entre une bâtisse et une tente d’un exposant mais Basile se soigne et demande à Daniel le deuxième détour de la journée. C’est ainsi que Henry se voit offrir en premier une carotte. Alors que je garde les deux ânes devant l’église Saint Paxent dont je n’ai jamais connu le nom au préalable, Daniel achète du pain et des viennoiseries chez le boulanger d’en face. Le deuxième couple de néerlandais arrive en pédalant. Pour ma propre culture, j’ai trouvé que Paxent aurait été un disciple de saint Denis de Paris sans trouver cependant son lien avec Cluis.
A la sortie du village, le soleil commence à refaire son apparition à travers de gros nuages, ce qui nous incite à continuer d’avancer sur le trajet. Sur notre droite nous apercevons le viaduc de l’Auzon qui desservait la voie Argenton sur Creuse vers La Chaussée. Aujourd’hui, il sert de temps à autre pour du saut à l’élastique. Au vu du trafic sur la D38 mais surtout à cause des jeunes conducteurs qui visiblement ont besoin de démontrer leur longue maîtrise au volant, il aurait été préférable de passer sur le pont. Faute d’avoir lu le guide de manière détaillée, nous nous sommes ainsi privés d’une vue sans doute imprenable.
Après Hallé où à l’entrée de la petite chapelle l’illumination de Noël a déjà été attachée en prévision des fêtes à venir ou bien n’a pas été enlevée depuis l’année passée pour s’épargner du travail récurrent, nous prenons en direction de Pommiers et croisons sur ce chemin une voiture avec une conductrice apprentie que nous allons encore retrouver en fin de journée. Daniel m’informe que son épouse vient de lui annoncer que le temps au Luxembourg avoisine les vingt-huit degrés, ce qui ne nous fait que rêver. Près de la première maison de Pommiers, une dame prend des photos et nous apprend qu’elle rêve depuis toujours de partir sur le Camino avec un âne. Elle nous raconte que quelques problèmes physiques et autres l’empêcheraient hélas de le faire. A titre d’information madame : il y a eu une multitude de personnes qui se sont lancées dans le passé, il y en aura autant dans le futur – peut-être pas forcément avec des ânes. Je suis loin de prétendre que je suis un expert en la matière mais j’ai déjà quelques kilomètres à mon actif et je ne peux que vous dire – PARTEZ et vous verrez. Le plus difficile ce n’est pas de faire les premiers pas qui peuvent faire mal en l’absence d’un petit entraînement. Non, le plus difficile c’est de résister à ses propres peurs de ne pas être à la hauteur et à imaginer ce qui pourrait ne pas fonctionner en cours de route.
Sur la grande place à Pommiers devant l’église, nous retrouvons Xavier qui déjeune et qui pour l’occasion a enlevé ses chaussures. Après avoir cherché un endroit pour laisser brouter les ânes, nous nous installons également pour casser la croûte et j’en fais autant que Xavier.
Pommiers est de nouveau un de ces villages qui a connu un nombre d’habitants assez impressionnant dans le passé – huit cent en l’an mille huit-cent quatre vingt-six – pour tomber à deux cent soixante et onze en deux mille huit. Ce qui m’a surtout impressionné c’est la propreté du village ce qui est loin d’être le cas partout sur notre trajet.
Comme l’église dédiée à saint Julien était malheureusement fermée au public, nous avons préféré continuer notre route pour éviter de nous payer encore d’autres averses sous un ciel dont la couleur a de nouveau changé vers du sombre prononcé. Comme le guide indique qu’il est déconseillé de se rendre par fortes eaux au Château Gaillard, nous ne nous y sommes pas rendus forts de notre expérience dans d’autres endroits ou la pluie des derniers jours avait fait monter les crues.
Daniel a visiblement bien supporté le coup que Henry lui avait affligé la veille. Malgré l’effort supplémentaire dont il a fait preuve, je dois dire que j’étais content de constater que notre destination du jour n’était plus qu’à une heure de marche.
Arrivés à Gargilesse, nous nous sommes rendus dans le bureau de l’Office du tourisme pour faire tamponner notre Crédentiel et avons noté au passage que Xavier avait déjà pendu ses chaussettes sur le revers de sa chambre.
Contrairement à un pèlerin à sac à dos comme Xavier, nous avions encore quelques charges à évacuer. Tous d’abord mettre tout le bagage à l’abri et surtout trouver un endroit pour les ânes. Avant de pouvoir le faire, Basile qui avait été attaché à un bac en pierre, alors que nous nous trouvions dans le bureau pour faire tamponner notre Crédential, a préféré se détacher en tirant tout simplement le bac de son support. Quelle connerie avec en plus un ciel qui commence à ouvrir ses écluses. Une fois les avoir attachés sous quelques petits arbres pour les protéger un minimum contre les averses, je me suis mis à la recherche de quelqu’un pour me reconduire à Neuvy pour récupérer la voiture et la bétaillère. Michel un ex-architecte qui exploite pendant sa retraite une agence immobilière m’a reconduit. Nous avons échangé nos vues sur certains sujets et constaté que dans les grandes lignes nous étions d’accord pour apprécier les choses. Au retour, j’ai encore fait un stop dans une ferme et demandé quelques fourches de foin pour les ânes. Un très grand merci au fermier qui m’a offert gratuitement une grande quantité de foin de première qualité. Dès mon retour, nous avons mis les ânes dans la bétaillère qui ont apprécié ce pied-à- terre sec et surtout la bouffe. Tout cet exercice nous a pris presque deux heures, pendant lesquelles le pèlerin sac à dos s’est reposé dans le sec alors que nous sommes rentrés trempés.
Avant de récupérer la bétaillère, monsieur le maire nous avait montré un pré appartenant à la commune où nous aurions pu laisser les ânes en l’absence des averses qui se sont abattues sur son village connu pour ses artistes. Le château fort qui date du VIIIe siècle n’a pas trop souffert dans le passé et les maisons collées autour donnent au village un vrai aspect fortifié. Les fresques dans la crypte valent vraiment un déplacement. Outre ses artistes, Gargilesse fait également, à maints titres et en particulier à travers la villa Alpina, référence à Amantine Aurore Lucile Dupin mieux connue sous le nom de George Sand, romancière et femme de lettres.
Le seul commerce ouvert est un bar tabac dans lequel nous prenons deux bières, Daniel de la vraie et moi, comme d’habitude, de la fausse pour le traduire mot à mot du luxembourgeois où autrement dit de la bière sans alcool. C’est en ce moment de repos, le premier de la journée, que nous avons vraiment senti la fatigue. A un certain moment, un client est entré pour acheter une cartouche de cigarettes dont le prix a retenu toute notre attention. Sans être des fumeurs, nous étions néanmoins d’avis que les cartouches locales avaient une autre forme que chez nous et probablement plus petites et plus chères.
Comme tous les autres pèlerins arrivés dans l’après midi nous préparons notre repas dans la cuisine commune du gîte très accueillant. Il y a Xavier, Marcel, Jack, sa fille Julia et un couple en tandem qui, comme nous avons remonté les bâts dans le bâtiment pour la nuit, ont fait de même avec leur vélo – prudence oblige. Difficile à dire pourquoi mais j’ai eu le sentiment que les personnes autour de la table ne se sont pas encore connues à suffisance pour entamer une discussion aisée. Tout le monde était par ailleurs probablement trop fatigué pour rester debout plus longtemps. Nous avons vite échangé les chaises de la cuisine pour le matelas.
 
 
 
 
 
 
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