SANTANDER
- MOGRO
Vendredi,
8 septembre 2017
Jour
8
15 km
Le
desayuno à l’hôtel San Glorio dans lequel nous avons passé la nuit range de
nouveau dans la catégorie café avec une petite sucrerie ce qui ne remplit bien
entendu pas l’estomac d’un pèlerin. Il faudra donc trouver un petit supplément
en cours de route.
La
veille nous avions décidé de pérégriner cette année jusqu’à Ribadesella pour
nous permettre toute option pour l’année prochaine. A partir de Ribadesella le
Camino del Norte passe par Gijon et une autre route passe par Oviedo. Nous
avons même envisagé de faire éventuellement une partie du Camino Frances tout
en respectant la distance restant à parcourir de Ribadesella à Santiago de
Compostella avec objectif d’arriver à terme l’année prochaine.
En
fonction de cet objectif nous avions décidé de ne faire qu’une demi-étape ce
vendredi et de profiter de l’après-midi pour prendre le train à partir de Mogro
pour aller visiter le musée préhistorique d’Altamira.
Les
premiers kilomètres après Santander s’inscrivent dans la rubrique : il
faut y passer pour avancer sur le chemin – sans plus. A Santa Cruz de Bezana et
Mompia on ne voit strictement personne : tout est fermé ou personne n’est
encore réveillée – il est quand même déjà neuf heures. A l’entrée de Mompia
nous croisons quand même une personne qui est en train de sortir sa voiture du
garage et nous l’interrogeons où on pourrait prendre un desayuno puisqu’un
hôtel qui faisait de la publicité devant sa porte qu’on pourrait y manger le
matin était fermé. Il nous recommande d’aller de l’autre côté de l’hopital « todo
recto y entonces a la derecha ».
Nous
passons un pont ferroviaire et tombons sur un rond-point dans lequel pas mal de
chauffeurs essayent de voir jusqu’où la loi de la physique peut les supporter
avant d’atterrir tout droit dans l’entrée de l’hôpital qui est intégré dans
l’infrastructure routière. Quelques minutes plus tard nous trouvons l’endroit
qu’on nous avait recommandé et à notre grande surprise l’établissement fait le
plein. Sans le départ d’autres personnes nous n’aurions plus trouvé de place.
Trouver autre chose qu’un croissant s’avère aussi difficile qu’ailleurs. Nous
mangeons donc de nouveau un croissant avec un café comme d’habitude le tout
arrosé avec trois écrans TV grande taille dont on avait augmenté le volume pour
que le son passe à travers toutes les discussions des personnes présentes.
Dans
le barrio Urba qui se trouve juste sur notre chemin il est difficile de le
croire si on ne l’a pas vu : toute une colline a été rasée et les plaies
dans la nature sont encore visibles. D’un côté on a construit des maisons
identiques sur quelques centaines de mètres, derrières des bâtisses dont
l’apparence laisse plutôt penser à un passé noir du XXe siècle, un
peu plus loin quelques architectes ont probablement eu carte blanche pour
construire des maisons futuristes le tout clôturé et surveillé par des caméras
et un accès unique pour voitures à travers un grillage qui peut probablement
arrêter un poids lourd. Face à tous ces nouveaux bâtiments, une maison
traditionnelle du pays fait pauvre mine alors que cette dernière a un charme
qui se marie tout à fait avec le profil accidenté du pays.
Un
peu avant Boo nous croisons un cultivateur avec son tracteur dont la date
d’acquisition remonte dans le temps avant qu’on ait entendu parler de pollution
atmosphérique. Quelques centaines de mètres derrière lui court un berger
allemand qui s’arrête un peu avant qu’on ne le croise, fait marche arrière dans
un pré, tire la queue sous la pense et commence à trembler. Quand on aime les
animaux, assister à une scène pareille fait mal – très mal. Ce chien n’a
probablement encore jamais eu un câlin et plus que probablement est ou a été
frappé régulièrement. Comparé à lui, nos chiens à nous vivent dans un paradis
mais comment le leur dire ?
Boo
a été un des seuls endroits où le chemin a été mal signalé. Les indications
dans les guides des différents pèlerins que nous croisons sont un peu
contradictoires et les flèches jaunes font défaut. En partant de la dernière
flèche que nous avons vu et compte tenu où nous voulons aller on devrait
s’orienter le long de la ligne de chemin de fer. Devant nous un couple de
jeunes dont la fille se ballade pieds nus et porte un sac à dos trop lourd
empiètent sur ce chemin mais quelques mètres plus tard ne semblent plus être trop surs de leur choix. De notre
côté nous optons également pour ce chemin et quelques centaines de mètres plus
loin nous comprenons pourquoi ils ont ralenti. A partir d’ici on a deux
options : soit passer le fleuve à la nage sous nos pieds, soit passer par
le pont de chemin de fer. Nous optons pour la dernière variante même si l’état
du pont laisse plus qu’à désirer. Après le pont et derrière le petit virage à
gauche nous voyons à notre grand étonnement l’affiche de la gare de Mogro.
Juste
avant de tourner à droite pour rejoindre notre hôtel arrive un train et à notre
grand étonnement une trentaine de pèlerins posent pied à Mogro. Il s’agit
probablement de ceux qui ont eu plus d’infos sur la problématique pour rejoindre
Mogro de manière normale.
A
notre arrivé à l’hôtel une étoile Le Joyuca del Pas, l’exploitant est tout
étonné de nous voir déjà à onze heures trente. Quand nous lui disons que nous
avons passé le pont ferroviaire il nous apprend que nous avons fait un
raccourci un peu risqué de quatre kilomètres. Pour le dire d’emblée, Le Joyuca
de Pas à Mogro a été l’hôtel avec un rapport qualité prix imbattable tenu par
un couple qui savent apprécier à leur juste mesure ce qu’est qu’un client.
Dans
l’après-midi nous avons pris le train depuis Mogro jusqu’à Barreda, puis nous
sommes allés à pied jusqu’à Viveda pour y prendre le bus jusqu’à Santilla del
Mar. A partir d’ici nous étions parti du principe qu’il y aurait une navette
qui desservirait les grottes d’Altamira à partir de Santialla del Mar.
Impossible d’en savoir plus – le point info en face de l’arrêt des bus était
fermé jusqu’à seize heures. Après avoir questionné plusieurs personnes au sujet
d’une navette, j’ai appris que le seul bus qui y irait serait une fois le matin
vers dix heures et une autre fois l’après-midi après seize heures. Pour le
surplus, ce ne serait pas une navette mais un bus qui dessert la grande région.
Finalement nous avons opté pour la variante télétaxi d’une entreprise de
Santilla del Mar. A ma grande surprise on me disait qu’il fallait attendre au
moins quarante-cinq minutes – sieste oblige. Après une attente qui n’en
finissait pas, un taxi passait et après lui avoir fait un signe qu’on était
client et qu’on voulait investir de l’argent pour une contrepartie de transport
il nous conduisait jusqu’au musée. Alors qu’il s’éloignait après nous avoir
déposé, je me suis rendu compte qu’il appartenait à une autre société que celle
à laquelle nous avions fait appel – eh oui first arrived – first served.
Les
grottes d’Altamira ont été découvertes en mille huit cent soixante-dix-neuf.
Classée comme patrimoine de l’UNESCO, la grotte originale est aujourd’hui fermée
au public pour éviter la prolifération par la dégradation due aux micro-organismes
qui contaminent la roche. Depuis deux mille un, une réplique peut être visitée.
Sur un tracé irrégulier de deux cent soixante-dix mètres on peut y admirer
certains des plus beaux témoignages de l’art rupestre préhistorique datant d’il
y a quatorze mille ans. Les images de cerfs, bisons, sangliers, etc. sont
reproduits comme dans l’orignal selon les mêmes procédés avec des ocres aux
tons rouge et entourés de noir. J’ai mis un certain temps à me mette dans le
contexte et ne plus vouloir, face à chaque image peint au plafond, la mettre
dans une logique comparative par rapport à quelque chose que j’ai déjà vu pour
pouvoir en mesurer leurs vrais valeurs. Stop : il s’agit d’œuvres datant
d’il y a quatorze mille ans réalisées par nos prédécesseurs qui ne
fonctionnaient pas de la manière dont nous le faisons de nos jours, qui ne
disposaient pas de références, de lumières artificielles, …
Dans
le hall d’entrée j’ai compté quinze personnes en uniforme qui étaient réparties
dans trois endroits différents tous en train de parler entre eux. Eu égard au
fait qu’on allait visiter une néo-grotte j’estimais ceci un peu exagéré et me
suis demandé si le nombre de surveillants à l’intérieur de la grotte serait encore
plus impressionnant. Loin de là – à l’intérieur de la grotte et de l’exposition
à sa sortie il n’y avait plus aucun surveillant. J’en tire la conclusion qu’ils
ont scané avec leurs yeux tous ceux qui entraient et leur ont fait confiance.
Le
retour à Mogro était aussi mouvementé que l’aller. Au final nous avons
cependant été compensés par le meilleur repas de tout notre périple. Le Joyuca
del Pas est l’adresse à noter dans vos références si vous passez dans le coin –
propre, convivial, familial, très bonne cuisine, prix plus que modéré et
contact avec les exploitants.