Intro
Camino 2015
Condom – Saint-Jean-Pied-de-Port
Juste avant la parution de cette série de reportages, le monde est sous le choc des attentats du 13 novembre 2015 à Paris.
Alors qu’il m’a été donné de pouvoir pérégriner pendant plusieurs années à travers la France, je dédie ma publication à toutes les victimes innocentes de ce massacre.
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Après une pause en 2014, j’ai repris le chemin vers Saint Jacques de Compostelle en 2015. C’est Nicolas et son épouse Christiane qui m’ont accompagné. Comme nous avions formé une bonne équipe lors de notre périple sur le chemin de Stevenson en 2014, il tombait presque sous le sens que nous allions tenter autre chose cette année.
Nicolas et Christiane avaient déjà marché sur la voie du Puy jusqu’à Lectoure et préféraient continuer sur cette voie. Comme je suis arrivé sur la voie de Vézelay jusqu’à Sainte-Foy-la-Grande, je ne voyais pas d’objection pour terminer la partie du chemin en France sur une autre voie, ceci d’autant plus que la distance entre notre point de départ, Condom et notre objectif pour cette année, Saint-Jean- Pied-de-Port est plus ou moins la même que celle reliant Sainte-Foy-la-Grande à Saint-Jean- Pied-de-Port.
En termes de préparatifs, Nicolas avait pris en charge la réservation des places dans les premiers gîtes alors que je m’occupais des déplacements. Comme nous avons tous les trois dépassé l’âge de soixante ans, nous avons acquis une carte Senior+ SNCF dont le prix d’acquisition s’est déjà amorti avec le seul aller.
Après avoir embrassé mon épouse, nous sommes partis le huit septembre vers six heures du matin à la gare de Lintgen pour y prendre le train pour aller à Luxembourg-Ville. A la croisée de ceux qui se rendent à cette heure matinale au travail, en tant que jeune retraité je me suis quand-même senti un peu privilégié dans le mesure où je peux dorénavant organiser mon temps comme bon me semble. A la gare routière nous avons cherché la navette spéciale Luxembourg – TGV Lorraine. En attendant son arrivée, j’ai observé le va et vient de ceux qui se rendent au travail avec le stress d’usage. Comme chaque capitale le Luxembourg n’est pas épargné, et particulièrement le quartier de la gare, d’une certaine catégorie de gens qui font de la nuit le jour et vont se coucher au moment où la majorité de la population active commence à travailler.
La navette arrivait vers sept heures et nous étions les seuls passagers à bord, même après une halte dans un autre endroit sur un parking à la périphérie de la ville. D’emblée le chauffeur nous annonçait qu’aujourd’hui était son premier parcours sans GPS puisqu’il fallait bien qu’on apprenne le chemin sans la contrainte de ces appareils qui nous accompagnent tout au long de notre journée. Comme la fourchette de temps restant avant le départ du TGV était assez confortable, nous n’y voyions pas d’inconvénient et les discussions portaient sur tout et n’importe quoi. Une fois lancé sur l’autoroute en direction de Metz nous avons pu observer le stop and go des frontaliers français qui rejoignent tous les matins le Luxembourg pour venir au travail et on se félicitait de ne pas être à leur place dans le bouchon.
Ce qui devait arriver arriva et une fois de plus la loi de Murphy a été confirmée. Quelques centaines de mètres après la sortie qui donnait sur Pont-à-Mousson, notre chauffeur se posait la question s’il n’aurait pas mieux fait de prendre cette sortie puisque l’environnement qui se dessinait devant ses yeux ne correspondait pas tout à fait à ce qu’il avait l’habitude de voir avec l’utilisation du GPS. Après un petit stop devant une station-service, l’exploitant lui indiquait une alternative et plus ou moins trente-cinq minutes avant le départ du TGV un panneau affichait TGV-Lorraine. Hélas, un chantier d’envergure nous attendait et la circulation entre deux ronds-points était assurée par des ouvriers qui n’avaient pas été formé à ce travail et auxquels manquaient visiblement toute supervision des choses. En deux mots : le chaos complet à plus de cinq kilomètres avant la gare. Rien à faire – il faut prendre le mal en patience, néanmoins le compte à rebours avant l’arrivée du train travaillait de son côté et contre nous. Une fois sorti du bouchon que le chauffeur aurait pu éviter, la vitesse de croisière augmentait et j’étais heureux de pouvoir sortir de la navette juste au moment où un salarié SNCF donnait accès aux passagers au quai. Et si on voyait les choses positivement ? Notre chauffeur avait considérablement réduit le temps d’attente au quai et évité qu’on ne prenne froid – il faudrait lui en féliciter.
Le TGV entrait dans la gare TGV-Lorraine à l’heure ce qui n’était cependant plus le cas à l’arrivée à Bordeaux. Dû à un problème lors de l’accrochage d’une rame supplémentaire en cours de route, nous avions un retard à Bordeaux Saint-Jean ce qui nous a juste permis de rejoindre la correspondance pour continuer notre route vers Agen. Comme ce train desservait tous les villages, nous avons eu le temps de décomprimer doucement et poser pied à terre à Agen à l’heure prévue. Pour continuer à Condom nous avons attendu la prochaine navette de bus. Il faisait encore vingt-six degrés à l’arrivée et comme nous étions les derniers passagers dans la navette, le chauffeur a proposé de nous déposer devant le gîte ce qui lui a rapporté un bon pourboire.
C’est au gîte Gabarre qui se trouve dans un ancien chai à armagnac en bordure de la Baïse qui traverse Condom que nous avons passé la première nuit. Le gîte porte sur une surface totale de trois cents mètres carrés et, outre l’accueil de pèlerins, sert pour des réceptions telles que mariages, séminaires etc. J’ai particulièrement apprécié l’effort que les propriétaires investissent dans la protection de l’environnement en récupérant les eaux de pluies, les minuteries au niveau des lumières etc. Ce que j’ai par contre moins apprécié était le peu de contact avec les exploitants. Un accueil très bref suivi des explications et instructions d’usage, l’encaissement de la redevance d’utilisation et le tamponnage du Crédential, le tout en moins de dix minutes. Le lendemain pour le petit déjeuner le temps consacré aux pèlerins se limitait également au strict minimum.