AIRE SUR ADOUR
- MIRAMONT
Dimanche,
13 septembre 2015
Jour
5
20 km
A l’origine nous avions prévu
cette étape comme journée de repos pour marcher un peu moins dans la mesure où
le guide affichait seulement quatorze kilomètres entre Aire-sur-l’Adour et Miramont.
Comme les indications relatives aux dernières étapes se sont avérées fausses,
nous espérions qu’au moins cette journée soit plus proche de ce qu’indique le
guide.
Il est sept heures trente quand
nous partons du gite à Aire-sur-l’Adour et nous sommes parmi les derniers à reprendre
la route. Premier constat : il ne pleut pas et le soleil fait tout
doucement son apparition.
Nous bifurquons dans la rue
Despargnet qui monte pas mal et passons près du gite de la chapelle des
Ursulines. Les photos affichées à l’extérieur laissent devenir que passer une
nuit dans cette chapelle désacralisée, doit être quelque chose d’exceptionnel. Louisette
et Bernard qui y ont passé la nuit nous confirment ce que les photos
promettent.
Nicolas m’informe que la plante
de ses pieds le préoccupe un peu mais qu’il peut néanmoins marcher. Comme nous
avons entretemps quitté le chemin goudronné et longeons un sentier forestier le
long du lac de Brousseau avec une longueur de mille deux mètres et une largeur
de quatre cent cinquante mètres les choses devraient tout doucement
s’améliorer. Le lac de Brousseau a récemment dû être vidé et se remplit tout
doucement ce qui nous prive de toute sa splendeur. Au moment où le chemin depuis
le lac s’apprête à longer une départementale nous trouvons un câble par terre
dont nous estimons qu’il s’agit d’un câble téléphonique - ce ne sera pas le
dernier câble qu’on rencontrera par terre. Par simple curiosité Nicolas le lève,
le tient contre son oreille et conclut par dire qu’actuellement tout est calme,
il n’y aurait personne en ligne pour le moment. Plus tard nous apprendrons que
les câbles par terre sont la conséquence de la tempête d’il y a quinze jours.
Sur plusieurs jours nous verrons des dépanneurs avec des voitures munis de
systèmes d’élévation chargés des réparations.
Le GR 65 continue sous la montée
et la descente de l’autoroute qui relie Bordeaux à Pau et comme les cultures ne
sont constituées que de maïs, Nicolas profite pour faire une petite sortie de
route à l’abri des regards. Au loin nous voyons d’autres pèlerins qui sont en
train de monter un tronçon avec un
dénivelé positif assez prononcé. Quelques mètres plus loin deux chasseurs
attendent près des leurs voitures que la chasse débute dont ils ont attendu
l’ouverture avec impatience. A leur vue, Christiane n’est pas trop rassurée
étant donné que nous devons encore passer le long de certains champs de maïs
ceci d’autant plus qu’on entend au loin quelques coup de fusils. Comme les
chasseurs m’avaient informés qu’ils chassent le faisan, la chevrotine devraient
dans la logique des choses partir vers le haut – espérons-le.
Lors de montée qui mène à Bégorre
j’avance à mon rythme et arrivé en haut je vois que Nicolas et Christiane ne
sont pas derrière moi. Ils ont fait une petite pause et me rejoignent peu après.
Vous me direz peut-être qu’il est indélicat de ne pas avoir attendu – certes on
peut voir les choses de la sorte. Néanmoins tous ceux qui randonnent souvent, savent
que vouloir adapter son propre rythme à celui qui vous accompagne n’est pas
recommandé. Soit celui-ci marche plus vite, soit il marche plus lentement.
Celui qui marche plus lentement et qui tente d’adapter son rythme à celui qui
avance plus vite en paiera les frais sous peu. Lorsque celui qui marche plus
vite essaye d’adapter son pas à celui qui marche plus lentement, il fatiguera
très vite. Nous en avons parlé et nul n’a vu un problème. Il y a des parties de
trajet que nous marcherons ensemble alors que sur d’autres nous marcherons à
intervalle. L’essentiel c’est que tout le monde en soit conscient et qu’on
arrive ensemble à destination.
A hauteur de Bacqué nous tombons
sur un banc avec une table et décidons d’y faire notre pause midi. Quand je
m’apprête à faire une photo, Nicolas met la main sur sa ceinture autour de
laquelle son appareil photo est normalement attaché et dois à son grand
étonnement constater qu’il n’y est plus. Nicolas ne serait pas Nicolas s’il
n’aurait pas une petite idée où il aurait pu le perdre.
Peu de temps après d’autres
pèlerins arrivent à hauteur de ce banc, entre autres une femme qui tire
derrière elle un appareil avec une roue spécifiquement aménagée pour y poser
une charge où elle a installé son sac-à-dos. Le tout ressemble un peu à une
broute à l’envers avec des manches longs et une petite roue mais sans la cuve.
Après la pause nous reprenons la
route en direction de Miramont et croisons deux pèlerins avec des sac-à-dos
flambant neufs qui doivent dépasser la capacité des quarante litres et dont le
poids semble supérieur à la référence recommandée. Nicolas et moi sont unanimes
qu’en cours de chemin ils vont liquider le trop emporté ou renvoyer une partie
à la maison. Tout cela nous rappelle nos débuts sur le Camino quand nous avons
voulu embarquer trop de choses dont on ne se sert jamais. Il faut vraiment
porter son sac-à-dos pendant plusieurs jours pour être à même de faire la
différence entre le strict nécessaire et le nice to have.
Vers quatorze heures nous
arrivons à Miramont à hauteur de l’église Saint-Martin. Ici nous croisons les
autres pèlerins que nous connaissons entretemps et qui ont préféré aller
jusqu’au village-étape pour faire la pause midi plutôt que de profiter d’un
banc en pleine nature. C’est également
ici que nous voyons pour la première fois les Pyrénées, tout au fond, à une
distance de plus de deux cent kilomètres. Toute cette chaîne de montagnes est
impressionnante et d’une beauté sans pareil.
Dans le gite qui est tenu par
deux volontaires qui ont déjà fait l’ensemble du Camino nous sommes
chaleureusement accueillis. Les locaux ne sont pas neufs mais bien entretenus
et surtout propres. Les chaussures restent à l’entrée et protection anti-puce
oblige, tout ce qui est amené dans les dortoirs doit être mis dans des gros
sachets en plastics qui sont encore pulvérisés avec un spray anti-puce juste
avant leur utilisation. Je garde ce gite particulièrement en mémoire par la
chaleur de l’encadrement des personnes qui y ont fait office.
Nicolas quant à son tour peut
recourir à la bienveillance d’une des gardiennes du gîte qui l’amène à
l’endroit où il avait sa sortie de route et retourne peu après. Le voilà
repropriétiaire de son appareil photo.
En tout nous avons marché cette
journée vingt kilomètres au lieu des quatorze marqués dans le guide le tout
pendant notre jour de repos.
Roland Bisenius