Châteaumaillant - La Chatre - Camino

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Trajet > 2012
CHATEAUMEILLANT – LA CHATRE
Vendredi, 18 mai 2012
Jour 1
24 km
 
J’ai très bien dormi. Un petit coup d’œil vers l’extérieur révèle que le ciel est un peu couvert - un risque de pluie ne semble cependant pas imminent. Hier soir, nous avions convenu avec madame Chabbert de prendre le petit déjeuner vers sept heures trente. Avant de nous y rendre, nous descendons nos affaires et rendons une petite visite à Henry et Basile, qui se trouvent au beau fixe et n’attendent qu’à se lancer.
Au tour de la table du petit déjeuner que madame Chabbert prend avec nous, se joigne un couple de Suisses qui est également sur la route du Camino. Nous échangeons des propos sur nos routes respectives et le trajet réalisé à ce jour. Contrairement aux autres Suisses que nous avons rencontrés sur  notre périple, ceux de cette année n’avancent pas les clichés bien connus qui unissent nos deux pays, mais nous révèlent ne pas avoir rencontré souvent un Luxembourgeois. Comparés aux Suisses nous sommes bien entendu peu nombreux, ce qui m’a amené à remarquer qu’il n’y a effectivement pas beaucoup de Luxembourgeois mais qu’on en trouve un peu partout dans le monde.
Avant de partir nous remballons la clôture électrique dans la bétaillère et convenons avec madame Chabbert de nous prendre en soirée à La Châtre, pour nous permettre de ramener la voiture au lieu d’arrivée de la journée et éviter en fin de parcours, de devoir trouver quelqu’un qui nous ramène à plus de cent kilomètre de chez lui.
Il est huit heures et demie quand les choses sérieuses de 2012 commencent et, contrairement aux autres années, Henry et Basile avancent d’un pas normal, ce qui est un bon signe et la preuve qu’ils ont savouré la liberté de se déplacer dans le pré du gîte où nous étions descendus.
Nos premier pas nous font passer de la D934 vers la D330 pour accéder à la D68 en direction de Neret. A mi-chemin entre les deux villages, nous laissons le Cher pour entrer dans le département de l’Indre. Devant nous, nous voyons les pèlerins Suisses qui ont comme avance le temps de bâter deux ânes, de les charger et de prendre congé de madame Chabbert. Au  carrefour près du monument aux morts de Neret, nous nous arrêtons devant l’église Saint Martin.  La particularité de Neret est certainement la pyramide des âges, avec une population de quarante pourcents de plus de soixante ans, alors que la moyenne nationale française pour cette tranche de personnes se situe autour de vingt pourcents. Le paysage parcouru fait découvrir quelques étangs et le ruisseau La Vallas.
A la sortie du village, nous restons sur le D68 en direction Le Mauray. Le paysage semble presque familier puis pas forcément différent de celui consacré à l’élevage au Luxembourg. Henry et Basile avancent à leur rythme, tranquillement mais avec une cadence régulière, comme une montre suisse dirais-je presque. Justement parlant des Suisses, nous les rencontrons près d’un banc en train de faire une petite pause. Nous les saluons et continuons notre route en direction de Lacs. Arrivés en haut d’une petite montée nous voyons les pèlerins helvétiques derrière nous et constatons un certain écart entre Monsieur et Madame. A vu d’œil mais sans avoir fait personnellement l’expérience, Daniel et moi sommes d’avis que la charge de leurs sacs à dos pourrait être un peu au dessus du recommandable.
Le temps pour pérégriner est idéal, ni trop chaud, ni trop froid et nous avançons convenablement. Au croisement de la D68 avec D73 à Fontenay, nous prenons en direction de Thévet sans pour autant nous y rendre puisque le Camino se jette sur les Ormeaux. C’est ainsi que nous passons d’un sol goudronné à des chemins empierrés pour continuer sur des chemins de terre, ainsi de suite pour arriver finalement vers midi à Lacs. Outre le chemin officiel du Camino, nous croisons ici le circuit Georges Sand.
En face de l’église Saint-Martin, nous décidons de casser la croûte et donner également aux ânes la possibilité de brouter un petit peu. Je découvre que cette église a été classée monument historique en mil neuf cent vingt-deux, ce qui coïncide avec l’année de naissance de mon père défunt à qui j’ai pensé en ce moment.
Quelques Lacubusiens sont en train de rassembler les restants de la brocante qui s’y est tenue hier et nous informent qu’ils nous auraient bien offert un verre si on était venu un jour plus tôt. Pas de chance, en revanche les ânes boivent à notre santé puisqu’un autre habitant nous prête un seau que nous remplissons dans la rivière en face de l’église.
C’est à ce moment qu’arrivent les Suisses qui s’étonnent de la vitesse à laquelle Henry et Basile avancent. Comme une petite brise s’est levée, nous nous mettons pour la pause de midi à l’abri devant une des bâtisses communales. Si les Suisses optent pour faire encore une bonne dizaine de kilomètres nous nous contentons d’aller vers La Châtre considérant qu’une bonne vingtaine de kilomètres pour la première journée est suffisante.
Dans un petit pré à hauteur du giratoire de la D943, Daniel reste près des ânes et je me renseigne à la première maison sur la direction du moulin de Bourgnon. Sur la dernière mise à jour de « l’Itinéraire du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle », figure en effet un gîte nouvellement admis. Cette solution nous semble plus prometteuse que de nous rendre au centre ville au risque de n’y trouver aucun abri pour les ânes. Nous sommes bien dans la bonne direction et le Monsieur auquel j’ai parlé nous indique un petit raccourci. A mon retour, Daniel m’informe qu’un jeune dans une veille américaine aurait fait deux fois le tour du giratoire pour inspecter de plus près les ânes et prendre congé en sortant sa main par la vitre le pouce en l’air pour signaler sa sympathie pour ce mode de déplacement.
Arrivés au moulin, nous faisons connaissance de l’exploitante, madame Pirot, qui nous accueille chaleureusement tout en nous signalant que sa mère vient de quitter ce monde le jour-même. Nous lui proposons de continuer notre route et ne point la perturber dans son deuil et nous excusons pour cette intrusion malgré nous. Madame Pirot insiste pour que nous restions et nous montre les locaux, y compris un grand pré pour les ânes. Après coup, je tiens encore une fois à témoigner à madame Pirot nos sincères condoléances et la remercier très chaleureusement pour son accueil. A tous les pèlerins qui cherchent une alternative au gîte en ville, nous ne pouvons que recommander la tranquillité et l’accueil au moulin du Bourgnon.
Après avoir placé les ânes, nous remontons les anciens escaliers en direction de l’église Saint-Germain qui a souffert d’un incendie en l’an mille cent cinquante-deux et dont le clocher s’est effondré en mille huit cent quatre-vingt-seize. Sur une petite terrasse, nous prenons une bière même si pour mon goût il fait un peu froid pour rester longtemps sans bouger à l’extérieur. Concernant la question du rapatriement de la voiture, nous pourrons certes recourir à madame Chabbert qui nous avait offert de venir nous prendre où bien utiliser un moyen de transport en commun. Hélas les transports en commun, même dans une ville comme La Châtre ne sont pas chose évidente. Le seul transport en commun vers Châteaumeillant est un bus qu’il faut commander par téléphone à l’avance et encore pas n’importe quel jour. En ce qui nous concerne, nous sommes au mauvais endroit le mauvais jour. Plus question des facilités que nous connaissons au Luxembourg – ce serait par ailleurs méconnaître le sens du Camino de vouloir retrouver le chez-soi partout où on se rend. Pour finir, nous optons pour madame Chabbert.
De retour à la Châtre, nous faisons un tour de la ville en passant par l’ancien Palais de justice et nous mettons à la recherche d’un petit restaurant pour nous offrir un menu chaud par jour. C’est dans la « Brasserie Fredy » qui affiche des spécialités alsaciennes que nous trouvons notre plaisir. Le local est bien fréquenté et nous venons juste d’être servi quand s’ouvre la porte et entrent six hommes qui se mettent à table. A les entendre parler, je n’en crois pas mes oreilles – ils parlent le luxembourgeois. Ils s’avèrent être des pèlerins qui sont en train de terminer leur périple de cette année, l’un connaît ma voisine et un autre mon voisin de l’autre côté de la rue. Grüezi les Suisses – nous ne sommes pas nombreux mais on est partout. 
 
 
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