Comillas - Unquerra - Camino

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COMILLAS _- UNQUERRA
Lundi, 11 septembre 2017
Jour 11
32 km
 
Le desayuno à l’hôtel El Tejo était de nouveau typiquement espagnol.
Nous laissons vite l’effervescence de Comillas qui se réveille tout doucement derrière nous pour pénétrer quelques kilomètres plus loin près de La Rabia dans un tout autre monde. Après avoir passé le pont de la Ria de la Rabia nous longeons un site renaturé dans lequel pleins d’animaux ont trouvé refuge dans les marécages. Comparé aux bruits des voitures et poids lourds le chant des oiseaux est une pure symphonie.
Sur toute la montée le long de la côte nous croisons principalement des jeunes allemands avec leurs VW Bully qui se donnent au plaisir du surfing. En l’absence des touristes en grand nombre, ils peuvent profiter pleinement de leur passe-temps abstraction faite de la présence des nombreuses écoles de surfing dans le coin. Vu de loin, surfer sur une vague doit être une sensation formidable. Par contre pour ceux qui apprennent la manipulation de la planche : tomber dans l’eau, remonter sur la planche pour retomber de nouveau directement dans l’eau ne doit pas forcément être au goût de tout apprenti.
Alors qu’il commence de nouveau à pleuvoir un petit peu, question de sortir la pèlerine pour dix minutes pour la remballer de nouveau, nous rencontrons deux jeunes filles qui portent chacune un sac à dos plus ou moins volumineux. Ce sont deux israéliennes qui ont commencé leur périple à Irun et qui veulent aller jusqu’à Santiago – chapeau.
Juste avant San Vincente nous découvrons entre deux écoles de surfing une petite épicerie qui a juste ce qu’il nous faut pour nous réapprovisionner.  Le Camino ne passe pas au centre de San Vincente mais le pont à passer dans la baie reste probablement dans la mémoire de chaque pèlerin vu sa longueur.
Après le pont le chemin monte de manière assez prononcée et il est préférable d’aborder les choses tranquillement même si la montée n’est pas longue. Nous avons trop souvent rencontré des personnes qui brûlent tous leurs grains dans un effort démesuré dans des endroits pareils et ce juste avant la pause midi.
Nous avons pris notre pause midi sous le porche d’une égalise près de La Acebosa. C’est ici que nous avons envisagé définitivement de nous arrêter cette année Ribadesella en lieu et place de Gijon pour nous laisser toutes portes ouvertes le tracé à prendre l’année prochaine et arriver à Santiago.
Par rapport au tracé des jours précédents, le terrain devient de plus en plus accidenté et nous apprécions à sa juste mesure le fait d’avoir recouru au transport de bagages. Au vu du tracé nous avions envisagé d’aller d’aujourd’hui jusqu’à Serdio. Or le relevé des hôtels de Miguel n’en prévoyait pas. Lorsque je l’avais appelé hier soir pour lui demander s’il desservait un hôtel à Serdio il m’a répondu comme si de rien n’était qu’il avait bien sûr un hôtel qu’il pourrait recommander « Unquera ». Miguel avait tout simplement oublié de nous dire qu’il ne s’agissait pas d’un hôtel qui s’appelait Unquera et qui se trouve à Serdio mais qu’il s’agissait du village Unquera qui se trouve à plus de cinq kilomètres de Serdio.
A la sortie de Acebosa nous avons vu devant nous un couple qui parlait l’anglais. Elle portait un sac à dos d’une taille raisonnable mais visiblement un peu chargé alors que monsieur en portait un d'une taille plus petite. Pour le surplus elle portait dans sa main gauche un sachet plus que chargé en plastique avec des provisions. Monsieur quant à lui portait dans sa main droite un plan du chemin. Lui, il courait comme s’il y avait une prime à l’arrivée pour le premier alors qu’elle le suivait au pas avec une petite difficulté quand même.
Là où le chemin prenait à droite pour aborder une nouvelle montée assez longue, eux continuaient tout droit. Dix minutes après ils nous doublaient, lui toujours en train de courir et de consulter le plan en même temps et elle qui avait des difficultés pour le suivre. Un peu avant d’atteindre le cimetière du village, il s’arrêtait et demandait à sa compagne de lui donner la bouteille d’eau – il en prenait une bonne gorgée et la lui rendait pour la replacer de nouveau dans le sachet à provision.
Il a fallu de peu pour lui demander s’il vivait dans un monde d’il y a des lurettes dans lequel les uns portent les charges et que les autres se contentent de la responsabilité ce qui a mal tourné à en interpréter son passage pour aller tout droit. Quand même – on est en deux mil dix-sept et plus au Moyen Age.
Toute la pluie des derniers jours semblent avoir disparu d’un coup pour céder la place au soleil. Il tombe sous le sens que l’atmosphère était un peu lourde mais avec la tempête qui avait été annoncée et qui s’est finalement avérée être un bon vent le tout était viable.
A Hortigal nous avons fait une pause-café auprès du seul bar dans le coin. Pas mal de pèlerins avaient  également repéré cette adresse : le temps d’échanger un peu avec ceux qu’on connaît de vue depuis quelques jours. Tout à coup le couple qui parle l’anglais rejoint également le bar – forcément le lecteur de carte s’était de nouveau trompé puisque dans la dernière montée ils nous devançaient. Alors que nous nous sommes contentés de boire les uns un café, les autres un coca, les pèlerins d’expression anglaise ont commandé un bocadillo et une boisson. Déjà impatient dans l’attente de la commande, il nous livre un spectacle type du manager ou soi-disant manager qui se croit indispensable et dont les cimetières sont remplis dans son genre. Dès l’arrivée du bocadillo il continue à tourner en rond sur la place de l’église en train de manger et de téléphoner. Carpe diem and calm down mon vieux – tu ne vis qu’une seule fois.
Alors que nous sommes en train de consommer nos boissons un bruit infernal retentit ce qui nous surprend et tout pèlerin est aussitôt sur ses gardes alors que le tout laisse les locaux dans une indifférence on ne peut plus. Plus tard en passant près d’une carrière nous comprenons qu’il s’agissait d’un des dynamitages journaliers. Une pèlerine écossaise me raconte plus tard qu’elle était justement à hauteur de la carrière quand un ouvrier a arrêté tout le monde en les informant qu’il y aurait un dynamitage sous peu. Ce sous peu durait quand même presque une demi-heure et alors que nul ne s’y attendait le tout fut lancé. Des heures plus tard elle avait toujours mal aux oreilles.
Juste avant d’arriver à Pesues plusieurs pèlerins s’offraient de quoi boire dans un bar près du pont. C’est ici que je voyais pour la première fois le vélo d’un pèlerin sur lequel et autour duquel il avait installé tout un inventaire d’objets dont aucun pèlerin n’a besoin. En regardant de plus près son conducteur je le rangeais de suite dans la catégorie to be seen. Je sais que c’est subjectif mais faire le Camino en tant que pèlerin croyant ou non, par conviction ou non, pour se trouver soi-même ou pour tout autre motif propre à chacun est une chose. Le faire pour se faire remarquer et tout entreprendre pour y arriver en est une autre. Le cycliste avait chaussé des chaussures noires qu’il a dû cirer un certain temps pour leur donner l’aspect miroir, son short ne rangeait pas dans la catégorie randonneurs mais plutôt dans les marques de luxe, le port de lunettes solaires alors que le coin de localisation du bar était dans l’ombre était également révélateur et pour couvrir sa tête son achat n’a pas non plus été fait dans le tout pour un randonneur mais dans une boutique au prix fort. Je l’ai revu à plusieurs reprises dans les journées suivantes toujours dans des endroits stratégiques qu’on voit de loin et par où il faut passer en tant que piéton. Outre ma vision subjective de voir les choses en occurrence, je me pose des questions pourquoi partir en vélo si on progresse aussi vite à pied.
La partie du chemin entre Pesues et Unquera longeait la ligne de chemin de fer et avait soufferte des pluies des jours précédents. Si un telle partie est au menu en fin de journée alors qu’on a déjà une bonne trentaine de kilomètres dans les jambes, cela vous prend à l’usure non d’un point de vue difficulté du parcours mais parce qu’on ne voit pas quand on arrive.
A Unquerra nous avons séjourné dans l’hôtel Canal face à la gare et proche d’un bar qui vendait des tickets d’autobus pour le compte de la société ALSA qui offre deux fois par jours le trajet Irun – Santiago et l’inverse. C’est dans ce bar que nous avons acheté nos billets de bus pour le retour de Ribadesello vers Irun. Géographiquement Unquera est à la frontière entre la Cantabrie et l’Asturie.
Lors d’un petit tour de ville nous avons découvert une de ces quincailleries qui existaient en son temps en nombre au Luxembourg mais qui aujourd’hui ont toutes disparu pour céder la place aux surfaces de bricolage. Qu’il était beau le temps quand on pouvait se rendre dans ces magasins pour aller chercher deux clous ou trois vis. Inutile de préciser que malgré la fatigue de la journée, Raymond, Nicolas et moi ont savouré nous balader dans les rayons.
Comme l’hôtel nous avait recommandé un restaurant nous y avons mangé à notre faim, même si nous étions les seuls clients du soir. C’est également ici que Nicolas et Christiane nous ont informés qu’ils entendaient faire une pause d’une journée et qu’ils se rendraient demain en fin de matinée en train à Llanes où nous nous reverrons en fin de journée. J’apprécie à sa haute mesure cette décision surtout qu’elle a été prise alors que la tête l’emporte sur le corps – l’inverse aurait le pire. Bravo en tout cas pour cette franchise et que je puisse encore marcher autant à l’âge de Nicolas avec ses soixante-douze ans.
Au moment de faire le petite lessive quotidienne je me suis rendu compte qu’une chaussette a rendue l’âme – usée par le frottement quotidien. J’ai préféré la liquider pour éviter de me payer une ampoule. Le prix d’une nouvelle paire de chaussettes sera largement inférieur à celui qu’il faudra payer pour une ampoule.
 
 
 
 
 
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